Pluies

1995
38 mn
Format : 35 mm, noir et blanc
Prix de la jeunesse et Mention Spéciale du Jury au Festival de Vendôme 1997

photo du film Pluies photo du film Pluies photo du film Pluies photo du film Pluies photo du film Pluies photo du film Pluies

Un homme et une femme mariée vivent à l'automne la dernière journée de leur amour, qui est aussi la plus belle.

Le paradoxe de l'amour, donné, ravi ensuite. Un film sans histoire, confié à la pudeur d'un instant qui contient l'épaisseur de tous les autres. Comme la fin qui s'enroule autour du début, la fin déjà contenue dans le commencement.

Extrait de l'article de Christophe Chauville dans le magazine Bref

A travers la dernière journée de la relation d'un couple (Marie Bunel et François Marthouret), Véronique Aubouy traque les signes de fin sous l'apparence de la félicité et travaille au corps à corps, serait-on tenté d'écrire, la notion de temps, avec une construction elliptique assez fuyante. Elle met en place un dispositif ouaté, où la vie semble ralentie, les contours des choses floues, les individus en état de vacances. Les sons et les paroles n'y ont pas tous la même intensité et du coup, ne prennent pas même valeur pour l'oreille qui les entend. Et l'eau... douches, averses... tombe sur les corps et les imbibe comme pour mieux les préparer à la révélation des ces instants, tout à la fois uniques et porteurs de toute une vie.

A l'intérieur de cette mise en scène, en effet, chacune des deux moitiés du couple représente une subjectivité d'appréhension de la relation et d'interprétation des événements - amoureux ou autres. Deux subjectivités distinctes, qui ne s'éloignent pas sous nos yeux, mais dont la dualité s'exprime imperceptiblement à l'attention directe de nos sens.

Qu'est-ce qui fait que le couple se disloque ? L'imminence du retour du mari de la femme ? Le départ prochain de l'homme pour New-York ? Leur possible volatilité des sentiments, devinée au détour d'un plan ? Une perversité ludique de cette bourgeoise qui prend un plaisir visible à s'exhiber à son amant sous le regard envieux d'un autre homme ? Rien n'est explicite, le spectateur voyage et se laisse gagner par la fascination trouble de ce cinéma d'essence nettement littéraire, volontiers proustien (lui ne s'appelle-t-il pas Charlus ?).

Elle, qui se nomme Anna, peut évoquer celle de Chantal Ackerman, dont les rendez-vous, eux aussi, partaient il y a vingt ans à la recherche du temps perdu et de la nature du sentiment amoureux.

Interview de Manuel Samoqueira, membre du jury de la jeunesse du festival de Vendôme 1997

Le jury de la jeunesse a surpris les habitués du festival en attribuant son prix à Pluies de Véronique Aubouy. Récompenser ce film, qui n'est pas « facile » était un choix courageux qui méritait quelques mots d'explications de la part d'un des membres du jury composé d'élèves du lycée Ronsard, Manuel Samoqueira.

De quelle façon a été pris ce choix surprenant ?
Ça a été difficile ! Nous avons hésité. Un autre juré qui a les mêmes goûts que moi, avait la même envie pour le palmarès : en faisant le bilan, c'est Pluies qui ressortait du lot. On voit très rarement des films comme ça !

A quel niveau ?
Quand il a commencé je me demandais ce que c'était, ça avait l'air assez esthétisant, je trouvais que ça faisait un peu "vieux film des sixties". Et pas du tout ! Il y a une vraie profondeur des personnages, la structure globale du film est impressionnante... Zonca a parlé de film antonionien, je n'irais pas jusque là, mais il y a de ça. Le travail sur le son, la fin, tout ça m'a rappelé Blow up. Devant un tel film, j'oublie tout !

Que reprochaient les adversaires du film ?
Certains étaient tangents. On a discuté et ils ont réfléchi, ils ne l'avaient pas vu sous l'angle de sa liberté : c'est un film où rien n'est vraiment dit et qu'on interprète comme on veut. C'est d'ailleurs ce qui a gêné ceux qui ne l'aiment définitivement pas : ils ne l'ont pas compris...

La décision a donc été difficile ?
On a commis l'erreur de débattre toute la semaine, au fur et à mesure. Pendant les délibérations, j'étais vanné ! L'an dernier où je figurais déjà dans le jury jeune, on avait mis une heure. Cette année, il y avait plus de bons films. Et je crois que s'il y avait eu des filles dans le jury, Pluies aurait été primé bien plus facilement...

Avec François Marthouret, Marie Bunel, Hubert Saint-Macary, Régis Franc, Denys Granier-Deferre, Philippe Bianco, Catherine Thérouenne, Valentine...

Scénario : Véronique Aubouy, Morgane Lombard
Image : Georges de Genevraye
Décor : Laurent Allaire
Costumes : Claire Guénaud
Son : Suzanne Durand
Montage : Audrey Maurion
Bruitages : Nicolas Becker
Musique : Timon Koulmasis
Mixage : Florent Lavallée
Stellaire Productions ; Région des pays de la Loire
Prime à la qualité 1996
Diffusion: France 2, Arte